Des lieux en recherche

Cet article a été publié dans l’ouvrage collectif Lieux infinis. Construire des bâtiments ou des lieux, publié par les Éditions B42 (en librairie le 8 juin 2018) à l’occasion de l’exposition « Lieux infinis » du collectif Encore Heureux, présenté au Pavillon français de la 16e Biennale internationale d’architecture de Venise, avec les contributions de Encore Heureux, Fazette Bordage, Gilles Clément, Jade Lindgaard, Jochen Gerner, Joëlle Zask, Luc Gwiazdzinski, Pascal Nicolas-Le Strat, Patrick Bouchain, Patrick Perez, Patrick Viveret, Raphaël Besson.

L’engagement critique contemporain se concrétise fréquemment dans et par l’occupation d’un lieu (bâti désaffecté, espace vacant, zone à défendre, espace public réinvesti), ce lieu offrant l’opportunité d’explorer des possibles en terme de mode de vie et de conduite d’activité, que ce soit sous la forme de jardins, d’ateliers d’auto- et de co-fabrication, d’espaces autogérés ou de ressources mutualisées. L’occupation est une création. Le lieu s’invente au fur et à mesure du développement des expériences et des expérimentations. Il naît des usages et des pratiques.

Ces lieux adressent aux institutions établies une critique en actes, une critique par le faire [1], une critique éprouvée dans une expérience. Ils relèvent de ce qu’Oskar Negt nomme des « espaces publics oppositionnels » [2] ou de ce que j’ai désigné comme des « communs oppositionnels » [3], à savoir des espaces investis collectivement dans lesquels un autre monde se cherche, se travaille, s’explore. La dynamique est tout à la fois critique et contributive. Ces lieux signent un rapport critique envers les modèles existants et, conjointement, contribuent à inventer de nouvelles pratiques et de nouveaux usages. Ils ne se ferment pas dans leur moment « négatif » (oppositionnel) mais le redéploient positivement dans un effort soutenu d’invention et d’expérimentation. En effet, la critique la plus audacieuse est bien celle qui est incarnée dans des expérimentations, dans des créations, en fait dans des œuvres communes. Ce sont ces réalisations qui viennent « dire » l’insupportable au sein de la société et qui viennent « dire » pareillement, concomitamment, le possible qui peut émerger.

Ces lieux sont donc fondamentalement des lieux-en-recherche. Yves Bonny distingue trois modes d’entrée en recherche : « être en recherche, se mettre en recherche et faire de la recherche. La première désigne une attitude ordinaire d’acteur lorsque celui-ci ne se satisfait pas des routines constitutives de sa pratique et de son univers d’expérience et les interroge sur la base de certaines aspirations. Se mettre en recherche implique une démarche plus systématique d’investigation, telle qu’on peut par exemple l’engager à travers l’inscription dans une formation individuelle ou la mise sur pied d’un collectif mobilisant des formes de recherche-action. La troisième expression, quant à elle, est réservée aux pratiques qui respectent les canons en vigueur du référentiel scientifique, dont les chercheurs professionnels sont les experts et les garants » [4].

Ces lieux possèdent une qualité auto-réflexive indéniable. Cet « être en recherche » est un impératif ; il est indissociable des expérimentations engagées et des possibles mis au travail. Les collectifs concernés développent une forte capacité d’explicitation et de distanciation, de mise en discussion et de montée en questionnement. Comment tirer les enseignements d’une expérience ? Comment ajuster un processus au fur et à mesure de son avancée ? Comment équilibrer les nombreuses implications sollicitées par la dynamique développée ? Comment penser des modes d’organisation garants de rapports égalitaires et porteurs d’autonomie ? Les collectifs se dotent de dispositifs pour relever ce défi à la fois démocratique et épistémique : analyse de pratique, récit d’expérience [5], journal collectif, cercle de discussion…

Mais ces lieux se mettent aussi en recherche car leur travail d’expérimentation les confronte à de nombreuses questions, des questions politiquement et intellectuellement exposées, risquées, éprouvantes, que ces questions concernent la ville et sa métropolisation néolibérale, le développement des communs, les violences faites aux migrants, les aspirations égalitaires et émancipatrices… Ces lieux s’apparentent à un observatoire socio-politique, logé au cœur des processus de transformation sociale. Ils représentent d’authentiques analyseurs, au sens que Georges Lapassade donne à ce terme [6]. En effet, en expérimentant, en décalant et en décadrant, en ouvrant des possibles et en les éprouvant, ils « mettent à découvert » nombre de réalités. Ils les rendent apparentes et en déplient les logiques. Ils en déploient les enjeux. Ils offrent un « centre de perspective » à partir duquel il est possible de porter un regard autre, différent, décalé. « Se mettre en recherche » est donc une part tout à fait constitutive de ces expériences et les acteurs de ces lieux s’appuient d’ailleurs sur une solide culture en sciences humaines et sociales et en philosophie politique pour faire face aux questions et enjeux que leurs pratiques ne manquent pas de débusquer. Dans le contexte d’asséchement intellectuel que vit l’institution universitaire en raison de ses évolutions néolibérales et quantofréniques, ces lieux représentent des espaces où la recherche critique résiste et où la vitalité du débat intellectuel se maintient.

Ces lieux sont de véritables lieux-en-recherche et leurs acteurs pleinement des chercheur-es [7], des chercheur-es hybrides qui emmêlent la recherche à la vie et instaurent des moments de recherche au cœur de leurs activités. Il s’agit de chercheur-es de plein vent et de grand air. Ils ne font pas nécessairement de la recherche leur spécialité ou leur préoccupation première mais ils font de la recherche dès lors qu’elle fait sens pour leur projet et qu’elle contribue à leur réalisation [8]. Dans ces lieux s’inventent donc de nouveaux modes de fabrication de la recherche (dans le champ des humanités). Ces praticiens-chercheurs poursuivent bien un objectif de connaissance, en complément et en prolongement de leur engagement premier qui peut être de solidarité ou de création, qui peut relever d’une pratique éducative, artistique ou architecturale. Ils s’attachent à formuler les savoirs associés à leurs actions et s’efforcent d’en établir la pertinence. Ces savoirs inhérents aux expérimentations sociales, politiques, éducatives, sociales ou architecturales circulent, se transmettent, se discutent, se confrontent entre eux à travers une grande richesse de rencontres, de forums, de publications en ligne ou en version papier. Ils sont néanmoins plus difficiles à identifier car ils ne sont pas rattachés à une institution (comme peut l’être l’université pour les savoirs de recherche établis sur un mode classique). Ils subissent le sort réservé classiquement aux pratiques minoritaires : plus « précaires » car disposant d’une assise institutionnelle limitée, sans cesse en (ré)émergence car rencontrant des difficultés pour préserver leur pérennité (ils se réinventent beaucoup) et moins considérés car toujours très hybrides et certainement plus libres.

Ces lieux expérimentent beaucoup et leur culture transformatrice les amène aussi, logiquement, de manière corrélée, à repenser les pratiques de recherche en sciences humaines et sociales. Comment se caractérise cette nouvelle « fabrique » de la recherche ? Il s’agit d’une recherche indisciplinée [9] qui refuse d’être assignée à un périmètre institutionnel (les disciplines académiques) et qui agit donc de plain-pied avec les expériences collectives et les expérimentations (les communs), au rez-de-chaussée des réalités et de plein vent. Je la qualifierai aussi sans hésiter de recherche malicieuse car elle tente des ouvertures et des passages là où les systèmes institutionnels dominants renvoient de l’immobilité et de l’empêchement et se montrent de plus en plus fréquemment répressifs. Elle relève d’une recherche mutuelle [10] qui se constitue comme « bien commun » et qui peut donc être engagée partout où les citoyens la jugent utile à leur expérimentation et à leur lutte. Cette recherche, à n’en pas douter, est une recherche intempestive qui n’est la propriété (symbolique et matérielle) de personne, même si elle profite des savoirs et savoir-faire d’acteurs spécialisés (sociologues, architectes, éducateurs, anthropologues, urbanistes…). Elle est nécessairement conduite en coopération et de manière autonome, et elle fait de l’autonomie le gage de sa créativité et de sa « productivité » (sociale et politique). Il s’agit d’une recherche qui auto-constitue autant que besoin ses outils et ses équipements pour ne pas être contrainte par des dispositifs standards, donc une recherche inscrite résolument dans une culture du DIY [11]. Dans un souci démocratique, cette recherche se réalise en open source en rendant apparents ses processus afin que les expérimentations puissent s’inter-connaître et s’inter-reconnaître, et afin que n’importe quel collectif activiste puisse s’inspirer d’une expérience existante et la réengager à son compte propre. Cette recherche se montre particulièrement dissipée car elle reste mobile et toujours « en déplacement » pour éviter de s’enliser dans un existant fortement contraint par les systèmes institutionnels établis et pour éviter d’être (re)saisie par les dispositifs dominants. Cette recherche se met au travail aux points d’émergence et sur les lignes de tension, là où les expérimentations tentent de faire bouger les réalités et là où, à l’inverse, les institutions dominantes sont « incapacitées » et ne parviennent qu’à capturer (prédation) ou réprimer. Cette recherche peut être qualifiée de profondément écosophique car elle se développe en conscientisant et en élaborant les multiples interactions sociales dans lesquelles elle est prise et qui la construisent. Attentive aux contextes dans lesquels elle se réalise, elle possède un caractère authentiquement convivial [12] ; elle s’acclimate dans une diversité de milieux de vie et d’activité, et elle se module et s’hybride, se compose et se recompose autant que nécessaire.

Cette nouvelle fabrique de recherche est consubstantielle à la « politique de l’expérimentation » [13] ambitionnée par de nombreux lieux, du modeste jardin au lieu de vie autogérée. Elle émerge de l’intérieur et par l’intérieur des pratiques, qu’elles soient éducatives, architecturales [14], militantes ou artistiques.

Cette fabrique de la recherche radicalement hors les murs (institués) est un équipement démocratique à mes yeux bénéfique à tout processus de transformation sociale. Elle pourrait devenir en quelque sorte un des langages vernaculaires des expérimentations sociales et des lieux qui les incarnent [15]. Elle se constitue alors en bien commun, ou mieux encore en « commun » car susceptible d’être réengagée librement par n’importe quel collectif, en fonction des questions qui le concernent. Elle pourrait donc tendanciellement équiper intellectuellement et politiquement tout type d’expérience ; elle deviendrait alors constitutive de l’expérience éducative, comme de l’expérience architecturale, de l’expérience artistique comme de l’expérience de soin. Si j’élargis mon propos, il serait même possible de préfigurer ainsi un « modèle » possible d’articulation entre pratiques dans lequel chacune deviendrait constitutive de l’autre, et toujours réciproquement, par un jeu de réversibilité des implications. Par exemple, la notion de « permanence architecturale », ainsi que Sophie Ricard et Patrick Bouchain la théorisent et la pratiquent, inspire significativement le travail de recherche-action que je développe aujourd’hui avec plusieurs ami-es chercheur-es [16] à Saint-Denis (93) et dans différents quartiers populaires. « La pratique de la permanence architecturale cherche à se familiariser avec les lieux. L’architecte tend à y devenir un habitant familier, ordinaire. Et la vision territoriale induite est tout autre : elle est celle d’un terrain en perpétuel mouvement, façonné par ses habitants, à petite ou grande échelle » [17]. Dans la période d’émergence de la politique de la ville (années 80 et 90) des expériences similaires ont été tentées par des sociologues, en particulier une expérience à Marseille que Michel Anselme restitue dans son ouvrage Du bruit à la parole – La scène politique des cités [18], qui a vu une équipe de chercheur-es rester au travail, en « résidence », dans un quartier pendant plusieurs mois en y ouvrant un lieu-atelier où les habitants pouvaient venir présenter et discuter la rénovation de leur logement. Ce type d’expérimentation s’est affaibli avec la forte institutionnalisation des politiques publiques. La revendication actuelle d’un « pouvoir d’agir citoyen » en rouvre la possibilité [19]. Cette « permanence » de la recherche me semble indispensable pour co-produire véritablement avec les personnes concernées.

Une pratique architecturale peut devenir constitutive d’une pratique de recherche, et réciproquement [20]. Il ne suffit pas d’écrire que les pratiques s’articulent entre elles, il me semble nécessairement de franchir un pas politique et épistémologique plus significatif en considérant que des pratiques en affinité sont capables de se co-constituer réciproquement et de se réinventer les unes les autres dans un (r)apport en réciprocité. Je pense à la permanence d’intervention d’Étienne Delprat et son collectif YA+K qui ont installé leur activité dans un quartier populaire de Bagnolet et y interviennent en collaboration avec un Centre social en créant, par exemple, un espace de jardinage et de socialité et en développant un lieu d’échange autour du bricolage et de la fabrication d’objets dans une culture du faire soi-même [21]. J’ai en tête pareillement le beau travail, lui aussi tenu dans la durée et la continuité, réalisé par le collectif Carton plein à Saint-Étienne dans un espace public, en l’activant et en le modulant, en le co-développant avec les voisin-es directement concerné-es pendant cinq années [22].

La recherche habite les lieux. Elle vit l’expérimentation ; elle vit à travers l’expérimentation. Cette nouvelle condition suppose de concevoir et d’écrire une nouvelle politique de la recherche et une nouvelle épistémologie des pratiques (une « épistémopolitique »). Deux perspectives me semblent incontournables. Tout d’abord, cette recherche se développe en traduction permanente afin de se déplacer, autant que nécessaire, d’un registre à un autre, d’un acteur à un autre, d’un contexte de présentation à un autre. Il s’agit toujours de la même recherche mais sans cesse réengagée, en permanence spécifiée, contextualisée et singularisée par un travail de traduction continué, ininterrompu. Cette recherche est plurilingue ou, plutôt hétérolingue [23]. Elle intègre donc une pluralité d’écritures selon les pratiques avec lesquelles elle s’hybride, les personnes qu’elle concerne et intéresse, les lieux dans lesquels elle acclimate ses analyses et ses concepts. En second lieu, cette fabrique de recherche inhérente à un lieu et à une expérimentation favorise une confrontation démocratique et bienveillante entre les nombreux savoirs impliqués par l’expérimentation. Savoirs d’expérience (l’expérience de l’habitant-e, du professionnel mais aussi du chercheur), savoirs spécialisés (les savoirs associés à la diversité des pratiques sociales, professionnelles ou non), et savoirs de recherche s’interpellent, se confrontent et « s’éprouvent » réciproquement. Chacun de ces savoirs chemine et se développe à l’occasion de ces interactions, grâce à elles et avec elles. Je pense que l’ensemble des acteurs peuvent en tirer un bénéfice et que chaque type de savoir peut être fécondé par cette dynamique – chaque savoir parvenant alors à se formuler plus clairement, à être mieux reconnu, à enrichir son langage, à devenir plus conscient de ses possibles et potentialités [24].

Les différents lieux auxquels j’ai pu m’associer en tant que militant et en tant que chercheur au cours des dernières années m’ont toujours paru particulièrement créatifs et productifs sur le plan intellectuel. Beaucoup d’entre eux tentent de faire vivre des « moments recherche », même si la notion de « recherche » n’est pas toujours utilisée, ni revendiquée. Il s’agit bien sûr d’une dynamique en émergence [25] – une réalité-en-devenir – qui hésite, tâtonne, avance souvent modestement et silencieusement. Elle peut se laisser intimider par les institutions établies de la recherche. En tant que pratique (encore) minoritaire, elle rencontre souvent des difficultés pour se faire reconnaître à sa pleine valeur. Il m’apparaît donc d’autant plus important de porter attention et considération, en tant que chercheur accrédité, à cette recherche en émergence, en la rendant visible et accessible et en discutant ses productions. J’ai souvent coopéré avec des collectifs avec la volonté de contribuer à ce que ces fabriques de recherche d’un nouveau type trouvent la voie de leur reconnaissance et réussissent à se développer. En apprenant à les connaître, je contribue aussi à leur reconnaissance.

Dans des jardins communs, dans des friches artistiques, dans des zones à défendre ou encore des espaces publics réinvestis, j’ai donc vu se développer d’authentiques petites « fabriques de recherche », souvent avec la présence de jeunes chercheur-es, avides d’espaces libres pour développer des recherches que l’institution universitaire ne reçoit pas, avec la présence aussi de professionnel-les expérimentant la recherche sur un mode joyeusement hybride et, surtout, de nombreux citoyen-nes et militant-es convaincus que la recherche est un outil précieux pour les luttes d’émancipation [26]. Ces « fabriques de recherche » s’installent donc au cœur des pratiques militantes ou des pratiques professionnelles, aussi bien en éducation, en soin qu’en architecture. Ils deviennent constitutifs des lieux de vie et d’activité. Ce sont des dispositifs toujours très situés et contextualisés, qui ont besoin certainement de se faire mieux connaître et reconnaître afin de contribuer d’autant plus vaillamment à la création de nouveaux imaginaires théoriques et conceptuels.

Pascal NICOLAS-LE STRAT, janvier 2018

[1] Michel Lallement, L’âge du faire. Hacking, travail, anarchie, Le Seuil, 2015.
[2] Oskar Negt, L’espace public oppositionnel, Payot, 2007.
[3] In Le travail du commun, Éd. du commun, 2016.
[4] Yves Bonny, « Les recherches partenariales participatives : ce que chercher veut dire », in Les recherches-action collaboratives – Une révolution de la connaissance (Les chercheurs ignorants), Les Presses de l’EHESP, 2016, p. 37.
[5] Voir à ce propos les travaux du Benjamin Roux sur la capacité / la nécessité pour les collectifs de « faire trace », « faire récit » et « faire histoire ». Se reporter à son site de recherche : http://www.cultivateurdeprecedents.org/.
[6] Georges Lapassade, L’analyseur et l’analyste (Recherches institutionnelles 3), Gauthier-Villars, 1971.
[7] Je fais le choix de signifier le masculin et le féminin, dans une perspective d’écriture inclusive, spécifiquement pour le terme chercheur-e, en raison de la place centrale de ce signifiant dans l’écriture de cet article.
[8] À la différence d’Yves Bonny, je ne pense pas que « faire de la recherche » soit une activité réservée à des chercheurs professionnels. De nouvelles manières de faire de la recherche (en sciences sociales et humaines) s’inventent aujourd’hui, en hybridité avec différentes pratiques (architecture, éducation, art…) et donc de plus en plus fréquemment hors les murs de l’université et des professions accréditées.
[9] Myriam Suchet, Indiscipline !, éd. Nota Bene, 2016.
[10] Anne Querrien, L’école mutuelle, Les empêcheurs de penser en rond, 2005.
[11] Elle relève du système DIY ainsi que le théorise et le décrit Etienne Delprat in Système DIY. Faire soi-même à l’ère du 2.0, éd. Alternatives, 2013.
[12] Ivan Illich, La convivialité, éd. du Seuil, 1973.
[13] C’est la thèse que je développe avec l’idée de « recherche en situation d’expérimentation ». Cf. mon livre Quand la sociologie entre dans l’action (la recherche en situation d’expérimentation sociale, artistique ou politique), Éd. du commun, 2018.
[14] Deux thèses remarquables, soutenues à la fin de l’année 2017, documentent et théorisent les possibles ouverts aujourd’hui par une pratique architecturale qui intègre substantiellement une politique de l’expérimentation et une épistémologie de la coopération / de la co-création (avec les personnes concernées), la thèse d’Édith Hallauer, Du vernaculaire à la déprise d’œuvre. Urbanisme, architecture, design, Université Paris Est, 2017 ; et la thèse d’Etienne Delprat, Architectures expérimentales. Penser et agir une pratique située (Généalogie, contexte et éléments théoriques) : l’expérience de YA+K, Université Paris Panthéon-Sorbonne, 2017.
[15] Cf. le travail d’Édith Hallauer sur le vernaculaire, op. cit.
[16] Martine Bodineau, docteure en sciences de l’éducation, ma complice en recherche (co-fondatrice avec moi du réseau des Fabriques de sociologie), Louis Staritzky, doctorant (laboratoire Experice Université Paris 8), Etienne Delprat, architecte et chercheur (collectif YA+K), Christophe Blanchard, anthropologue (co-responsables avec moi de la thématique « Territoires en Expériences » que nous développons au sein du laboratoire Experice, Université Paris 13 et Université Paris 8) et Luiza Dalpiaz, chercheuse en sciences de l’éducation (Universidade do Oeste de Santa Catarina, Brésil).
[17] Édith Hallauer, « Habiter en construisant, construire en habitant : la “permanence architecturale”, outil de développement urbain ? », Métropoles, n°17, 2015 ? En ligne : http://journals.openedition.org/metropoles/5185/. Se reporter aussi à La permanence architecturale (Actes de la rencontre au point h^ut, 16 octobre 2015), Hyperville, 2016.
[18] Michel Anselme, Du bruit à la parole – La scène politique des cités, éd. de l’Aube, 2000.
[19] Marie-Hélène Bacqué et Mohamed Mechmache, Ça ne se fera plus sans nous. Citoyenneté et pouvoir d’agir dans les quartiers populaires, rapport au Ministre délégué chargé de la ville, 2013.
[20] Je pourrais prolonger mon propos en soulignant que, dans une pratique de recherche-action et de recherche collaborative, la pédagogie (se former avec l’autre), le care (porter attention), l’expérience plastique (donner forme) sont constitutives de la pratique de recherche.
[21] J’entretiens un cadre d’échange régulier, depuis plusieurs années, avec le collectif YA+K. En ligne : http://yaplusk.org/.
[22] Cette expérience a donné lieu à une riche et rigoureuse restitution : Carton plein, La Cartonnerie, expérimenter l’espace public – Saint-Étienne, 2010-2016, Collection Recherche du PUCA (Plan Urbanisme, Construction, Architecture), 2016. Cet effort de problématisation et de restitution reste rare ; il est exemplaire de ce que peut être une « fabrique de recherche » complètement immergée dans une expérimentation et associée à sa réalisation. J’ai partagé des moments d’échange avec le collectif Carton plein et je suis resté attentif à son activité tout au long de son expérimentation stéphanoise.
[23] Myriam Suchet, L’imaginaire hétérolingue. Ce que nous apprennent les textes à la croisée des langues, Classiques Garnier, 2014.
[24] À la lecture des travaux d’Isabelle Stengers, je fonde ces nouvelles perspectives épistémopolitiques (politiques et épistémologiques) dans les termes d’une « mise à l’épreuve réciproque des savoirs ». Les savoirs (spécialisés, de recherche, d’expérience, militants…) se mettent en risque les uns en rapport aux autres, sur un mode réciproque et réversible et, grâce à cette épreuve profondément démocratique, assurent leur fiabilité. Cf. mon livre Quand la sociologie entre dans l’action, op. cit.
[25] Je défends le principe d’une « sociologie qui prend en compte le réel-en-devenir ». Cf. mon livre Quand la sociologie entre dans l’action, op. cit., p. 107 et sq. Dans la période contemporaine, il me semble essentiel de porter attention et considération aux « émergences ». En cela, je rejoins Boaventura de Sousa Santos lorsqu’il écrit : « S’éloignant des postures convenues, la sociologie des émergences suggère d’étudier les potentiels émancipateurs d’une grande diversité de pratiques alternatives […]. Même si elles sont sans cesse guettées par la marginalisation ou la récupération, elles n’en indiquent pas moins que, pour reprendre la célèbre formule du Forum social, un autre monde est possible et il est déjà présent dans une multiplicité d’expériences, fragiles, certes, mais aussi utopiques et réalistes », in Épistémologies du Sud (Mouvements citoyens et polémique sur la science), Desclée de Brouwer, 2016, p. 12-13.
[26] Christian Verrier, Former à la recherche en éducation populaire (Une voie coopérative d’émancipation avec, par et pour le peuple), Chronique sociale, 2017.